Chômage qui est responsable ?
Après s’être attaqué au code du travail, le gouvernement a dans le viseur l’éducation et la formation : « concertations » sur l’accès aux études supérieures, la formation professionnelle, l’apprentissage et la réforme du bac. L’éducation se voit porter la responsabilité du chômage. Pourtant c’est bien le patronat qui préfère courir derrière les profits en investissant dans la finance plutôt que d’investir pour nos emplois. Des 1 million d’emplois promis par le MEDEF en contrepartie de crédits d’impôt, nous n’avons vu qu’un pin’s sur la veste de Pierre Gattaz. Ce faux procès à l’éducation est le prétexte à l’individualisation et la casse des diplômes nationaux base des conventions collectives et des statuts. Il est utilisé pour réduire les attentes envers l’éducation aux besoins des entreprises.
Massification scolaire ou sélection ?
L’élévation du niveau global de qualification est autant un enjeu de progrès social qu’une nécessité économique. Les gouvernements successifs n’ont pas financé la massification de l’enseignement supérieur à hauteur des besoins. Sur les dix dernières années seulement, le nombre d’étudiant.es a augmenté de 20% alors que le budget alloué n’a augmenté que de 10%. Pour 2018, la hausse du budget est de 0,75% en deçà de la hausse des prix attendus. Pas étonnant qu’aucune création de postes ne soit prévue. Devant ce constat, l’alternative politique est claire : soit investir pour se donner les moyens de la massification, soit sélectionner pour réduire le nombre d’étudiant.es !
Pour le gouvernement : on sélectionne !
À la suite de cette rentrée catastrophique dans les universités symbolisée par les refus d’affectations et le tirage au sort, le gouvernement a lancé des « concertations » éclaires pour réformer le premier cycle universitaire. L’objectif affiché par le gouvernement était de répondre à « l’échec en Licence ». Les étudiant.es issus des bacs pro sont régulièrement montrés du doigt, sans que soit remise en cause la réforme du bac pro en 3 ans. Le gouvernement veut instaurer des « contrats de réussite » que devront signer les étudiant.es (individualisant ainsi l’échec et culpabilisant chacun) et mettre en place des « prérequis ». L’objectif réel est d’instaurer une sélection à l’entrée en Licence, après que le gouvernement précédent l’a fait à l’entrée en Master.
Des moyens pour toutes et tous !
La FERC-CGT refuse cette orientation qui va à l’encontre des besoins de notre société, elle fait le choix de la réussite et de l’émancipation de toutes et tous. Les 5 milliards de cadeaux faits aux plus riches seraient mieux utilisés s’ils étaient mis au service des jeunes pour leur permettre de construire tout au long de leur cursus leur orientation sans choix irréversible. À l’opposé d’une individualisation des formations et des diplômes par bloc de compétence, la FERC-CGT défend la mise en place de véritables passerelles permettant la fluidité des parcours. Le droit de « prendre son temps » doit être reconnu aux jeunes. Il faut penser l’université dans l’ensemble des formations supérieures. Pour permettre ce droit aux choix, il faut des moyens pour ouvrir les places nécessaires en BTS, IUT, Licence ...
Les prérequis ou la sélection à peine voilée.
A côté de la « sélection » que les IUT, BTS et CPGE continueront à opérer, les Universités pourront fixer des « attendus » qui leur permettront de trier les candidatures qui leur seront soumises.
Désormais, les candidatures individuelles des lycéen.nes seront examinées aussi par les établissements pourtant décrits comme « non sélectifs ». Les notes et bulletins, les avis des conseils de classes seront pris en compte. Les universités pourront même demander des lettres de motivation ou des compte-rendus de projets associatifs, afin de déterminer si un.e lycéen.ne a le bon profil et les résultats pour intégrer telle ou telle formation. Par ailleurs le travail sur l’orientation ne se limite pas à la classe de terminale, pourtant depuis des années les moyens dédiés à l’orientation des collégien.nes baissent (manque chronique de personnes d’orientation, fermetures de CIO …)
Une université pourra dire non à un.e lycéen.ne que s’il a atteint ses capacités d’accueil. Les filières « en tension » ne se résument pas au STAPS, au droit ou à la psycho souvent mis en avant, à cette rentrée elles regroupaient 169 filières. Les universités pourront aussi répondre « oui, si » et imposer le suivi en plus des modules de rattrapages (les modules en ligne, les Moocs sont fortement mis en avant) avec une éventuelle année de renforcement.
Les risque est grand de voir apparaà®tre des parcours à plusieurs vitesses jouissant d’une reconnaissance différenciée. Comment sans moyen supplémentaires demander aux universités de mettre en place des dispositifs de rattrapages ? Comment alourdir les cursus des étudiant.es les plus fragiles alors que plus de 50% d’entre eux travaillent pour financer leurs études ?
La modularité l’outil de déréglementation de l’enseignement supérieur.
Le maà®tre mot de cette réforme sera celui de « modularisation » : décomposer et recomposer les blocs de la licence permettrait de le faire à son rythme, en deux, trois ou quatre ans. A priori difficile d’être contre !
Sauf que cette volonté de modularisation est faite sans moyens. Pour faire des économies, les universités seront contraintes de regrouper dans des amphis des étudiant.es de plusieurs sections avec le même enseignant.e ou tableront sur l’utilisation de la formation en ligne (les fameux « Moocs »). Le résultat : les conditions d’apprentissage pour les jeunes et de travail pour les personnels seront encore plus dégradés !
Mais le principal intérêt pour le patronat est la casse du cadre national des diplômes. Les diplômes étant à la carte, les salaires le seront aussi ! C’est le pendant dans l’éducation du projet libéral d’individualisation des salarié.es et de remise en cause de la hiérarchie des normes.
Comme les attendus et les diplômes pourront varier selon les établissements, la carte de France deviendra un vaste outil de tri : qui sera admis à faire la licence d’une même discipline dans une « université de recherche », « une université d’excellence » ou dans un « collège universitaire » o๠la proportion d’enseignant.es chercheur.es sera réduite ? Toutes les universités ne seront pas pour tout le monde.
En filigrane c’est la spécificité d’un enseignement universitaire adossé à la recherche ouverte à toutes et tous qui est remis en cause. C’est aussi à terme le statut d’enseignant.e-chercheur.e qui est en danger.
Les questions budgétaires et de postes soigneusement évitées
Le gouvernement communique sur son budget d’un milliard sur le quinquennat pour financer son « plan étudiants ». Sur ce milliard 500 millions avaient déjà été annoncés via le Plan d’Investissement attribués aux Universités sur appel à projet et donc sans rapport direct avec les besoins pédagogiques ou les difficultés de fonctionnement.
Au final, le plan prévoit la création de 32 000 nouvelles places pour tout le quinquennat dont 7 000 en BTS et l’embauche de 2 500 enseignant.es supplémentaires dans le Supérieur. Or le gouvernement prévoit 200 000 étudiante.es supplémentaires à la fin du quinquennat, un chiffre sous-estimé, on sait que dans la seule année 2017 près de 80 000 bachelier.es professionnels n’ont pas pu entrer dans le supérieur.
Sur le fond, donc le gouvernement déconnecte le problème de réussite étudiante et le manque de place, de la question des moyens. Or, le budget de l’Enseignement Supérieur est insuffisant et en baisse depuis 2008. Il n’a pas permis de faire face aux 180 000 étudiant.es supplémentaires arrivé.es entre 2009 et 2016. Le gouvernement cherche donc à faire porter aux étudiant.es la responsabilité de leur échec ou de leur réussite.
Qualification contre compétences
La vision gouvernementale de la « formation tout au long de la vie » est la même que celle du patronat : déréguler et individualiser, en cassant les cadres et repères collectifs. Le gouvernement souhaite généraliser les « blocs de compétences ».
En remplaçant la qualification par les compétences, c’est l’ensemble des outils qui font sens et permettent aux salarié.es de se reconnaà®tre collectivement au sein d’un champ professionnel et d’un métier qui disparaissent. Cela remet en cause les contenus des diplômes, leur qualité et leur caractère national. Ce n’est qu’ainsi que l’on peut comprendre la volonté de remettre en cause le Baccalauréat comme premier grade universitaire.
Pour remplacer les diplômes, le patronat veut imposer les certificats de qualification professionnelle et les blocs de compétences dont il définira lui-même les contenus.
Globalement, les récentes réformes de la formation professionnelle tout au long de la vie organisent la formation sous le seul angle de l’emploi, au prétexte que la formation permettrait de réduire le chômage. Or la formation ne crée pas l’emploi. L’objectif réel est de servir les seuls intérêts du patronat et de renvoyer l’individu la charge de son « employabilité ».
Ni prérequis, ni selection, des moyens pour la réussite de toutes et tous
La FERC-CGT s’oppose à la remise en cause du bac comme 1er grade universitaire et diplôme national garantissant l’accès de tous les bachelier.es sur tout le territoire aux filières post-bac et aux établissements de leur choix, à toute extension de la sélection. Elle refuse la création de voies de formation de relégation réservées aux seuls bachelier.es professionnels et technologiques.
La FERC-CGT revendique une élévation du niveau de qualification de tou.tes les jeunes leur garantissant l’accès à un emploi stable et bien rémunéré. L’enseignement public, scolaire et supérieur, doit permettre l’égal accès de toutes et tous au meilleur niveau de formation. Il doit être qualifiant et doit permettre de valider les années d’études par un diplôme reconnu dans les grilles de classification afin de garantir les droits et rémunérations des futur.es salarié.es.
Sans moyens pour donner de bonnes conditions de travail au personnel des établissements et de bonnes conditions d’études aux jeunes, notre système éducatif reproduit les inégalités sociales. Il n’est plus en capacité de remplir ses missions et de porter l’espoir de promotion sociale faite aux jeunes et à leurs familles.
Pour la FERC-CGT, l’Ecole et l’Université doivent contribuer à la construction des connaissances, constituer un lieu o๠tous les élèves et étudiant.es peuvent s’approprier les savoirs, acquérir un esprit critique et accéder à la culture. Ainsi, elles contribueront à l’émancipation de toutes et tous.