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Pourquoi la CGT appelle à se mobiliser le 9 octobre

Une tribune de Bernard Thibault dans Libération

jeudi 4 octobre 2012

Que peut-on espérer des concertations et négociations sociales voulues par le gouvernement, si on nous impose des postulats contestables dès le départ ?

L’objectif jugé prioritaire, sous la pression des marchés financiers, d’un déficit public sous le plafond de 3% du PIB dès 2013, loin de résoudre le problème de financement de l’Etat, va sans aucun doute l’aggraver vu l’environnement économique actuel. On parle déjà de 300 000 chômeurs supplémentaires d’ici 18 mois c’est à dire plus de dépenses sociales et moins de recettes fiscales.

Parallèlement un chantage éhonté à l’emploi, aux délocalisations, voire à la mort de grands groupes, est développé par le patronat qui entend obtenir du fait de la crise des décisions sur le terrain de la flexibilité et du « coà »t du travail ».

Cette campagne cherche à exploiter l’inquiétude légitime des salariés dont Plus d’un sur 2 « craint d’être victime du processus de déclassement social ».

En matraquant ce qui serait une solution miracle, le patronat cherche à faire oublier l’essentiel : les banques et les grands groupes peuvent afficher des bénéfices importants et des trésoreries florissantes, alors que la désintégration des filières industrielles, le chômage et la précarisation se poursuivent en Europe.

Le gouvernement met à l’étude différents scénarios en écho à la revendication du Medef, au nom de la compétitivité pour transférer une partie des cotisations sociales sur la CSG ou d’autres assiettes. 20, 30 ou 40 milliards représentants une part du salaire socialisé versée par les entreprises seraient à la charge des ménages consommateurs ou contribuables.

On nous appelle à conclure des accords dit « gagnant-gagnant » qui conjugueraient l’acceptation des salariés à une plus grande flexibilité tout de suite contre la promesse d’un retour à meilleure fortune lorsque cela ira mieux…un jour !

Au delà d’expériences d’entreprises ayant conclus de tels accords en France, toute l’Europe syndicale est témoin des signatures trahies. En Espagne le recul de l’à¢ge de départ en retraite devait éviter la récession, en Italie c’est fiat qui renie sa signature, en Irlande et dans toute l’Europe centrale c’est la hiérarchie des normes qui est piétinée, la Grèce est sur le point de devenir une vaste zone franche de toute réglementation sociale…au nom de la crise.
Les causes du chômage et de la fonte de notre industrie ne sont pas à rechercher dans le coà »t du travail et les droits sociaux mais dans l’affaiblissement de notre système productif, le vieillissement et la désagrégation du projet collectif qui l’accompagnait.

Le monde de la finance nous fait croire depuis 25 ans que l’on va pouvoir conserver les tà¢ches les plus nobles de recherche et d’innovation et se décharger sur les pays émergents des fonctions plus frustes de fabrication. Le mythe de la « société sans usine » fait toujours des dégà¢ts. Cette stratégie financière de « tronçonnage » des activités productives qui se traduit par des licenciements massifs et nombreux, permet des plus-values à court terme.. Chacun sait pourtant que l’on ne peut bien longtemps dissocier des fonctions de recherche, de production, de formation, qui participent d’un système productif cohérent répondant aux exigences environnementales

Aucun des problèmes économiques structurels, ni le financement des retraites et de l’assurance maladie, ni le rééquilibrage de notre commerce extérieur, ni le besoin de financement de l’état et des collectivités territoriales, ni la question du pouvoir d’achat, ne peuvent être résolus sans une vigoureuse politique de développement industriel et de l’emploi, de lutte contre la précarité.

L’industrie est en pleine transformation sous la pression de mutations technologiques et sociétales profondes. La transition vers un mode de développement « bas-carbone », améliorant l’efficacité énergétique, valorisant le travail et protégeant la santé est devenue décisive. Elle est inséparable de la mise en place de la sécurité sociale professionnelle concrétisant enfin un vrai droit à l’emploi.

La France et l’Europe ont dans l’automobile, l’aéronautique, l’énergie, les matériaux nouveaux, des cartes majeures à jouer. Il y a urgence à ce qu’une loi protégeant des sites comme Aulnay, ou Florange soit adoptée rapidement. Il y a urgence à créer les conditions du financement de nouvelles entreprises assurant le développement de productions stratégiques pour le pays. Un grand pôle public de financement du développement industriel et de l’emploi est nécessaire. Il ne suffit pas pour cela de créer une banque publique d’investissement. L’essentiel est de desserrer la contrainte d’exigences de rentabilité financière imposées par les marchés et les multinationales.

Développer des ressources en emplois et en qualifications doit devenir la priorité. Alors que la démographie fait peser une grave menace sur l’avenir de l’industrie du fait des départs à la retraite, il faut permettre aux ouvriers, techniciens, ingénieurs de garder un emploi et de transférer leurs connaissances jusqu’au moment o๠ils choisissent de partir à la retraite. Enfin il faut garantir à tous l’accès à la formation car cette hécatombe se conjugue avec un manque de qualifications reconnues.

L’Union européenne est aujourd’hui un espace de mise en concurrence des salariés et des services publics sous une contrainte financière renforcée par le traité. Les règles de solidarité sont réduites au minimum. Le syndicalisme, en France comme dans les différents pays européens, est sur le pont, il sera dans la rue de plusieurs villes de France le 9 octobre pour l’emploi et l’avenir de nos industries.