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Généralisation du Bac Pro 3 ans : passage en force !

lundi 26 novembre 2007

Sans aucune concertation, sans aucune préparation, le ministre Xavier Darcos entend généraliser les baccalauréats professionnels 3 ans d’ici 2010. Une note du ministre (ci-jointe) annonce une première étape à la rentrée 2008 consistant à remplacer 25 % des secondes professionnelles BEP par une 1re année de bac pro 3 ans. Cette décision, pour ne pas dire ce diktat, s’accompagne de l’objectif d’une réduction, à terme du nombre de diplômes.

Si elle aboutissait, elle aurait des conséquences désastreuses sur l’organisation et la finalité des enseignements professionnels. Elle conduirait à la disparition complète des BEP et de la passerelle vers la voie technologique. Elle mettrait en difficulté les élèves de Lycée Professionnel qui ont besoin d’un cursus complet pour construire leur qualification professionnelle.

En effet, le bac pro réunit plusieurs finalités. Comme les autres bacs, il associe formation générale et poursuite d’études, mais il intègre une dimension particulière par des objectifs d’insertion professionnelle. Ses contenus sont définis en concertation avec les professions à partir de Référentiels d’Activités Professionnelles (RAP), socles des contenus de formation.
Actuellement, le BEP s’inscrit dans le cursus du bac pro. Les unités constitutives des référentiels confèrent une continuité pédagogique du niveau V au niveau IV. Le fondement de cette continuité BEP/ Bac pro est à rechercher dans ce modèle original qui combine savoirs généraux et savoir-faire. En d’autres termes, les 4 ans de formation (2+2), prennent en compte les exigences multifonctionnelles de la formation, à la fois scolaire et professionnelle.

La CGT-Educ’Action académie de Créteil est favorable à la possibilité de parcours diversifiés mais elle n’acceptera pas la généralisation du bac pro 3 ans qui rompt avec les exigences des formations. Plusieurs comptes rendus ou rapports de l’administration vont dans ce sens en délimitant les conditions des parcours 3 ans et en mettant en garde contre toute généralisation.

Cette volonté d’amputer d’un an ces parcours est guidée par la seule recherche d’économie budgétaire. Il faut bien trouver comment supprimer les 85 000 postes dans l’Education nationale d’ici 4 ans. L’intérêt pédagogique disparaà®t. La structure d’accueil des formations est imposée comme préalable avant même que ne soit discutés et définis les contenus d’enseignement. C’est mettre la charrue avant les bœufs mais c’est surtout indiquer les priorités qui sont maintenant celles de l’Education nationale.
Sur cette question comme sur beaucoup d’autres, le ministre illustre une conception particulière du dialogue social. Les informations ont été mises sous embargo. Les groupes de travail chargés de la rénovation de l’enseignement général dans les BEP et les Bac Pro en place depuis 2006 sont suspendus. La volonté de passer en force est patente.

Mais ces décisions révélées par les organisations syndicales, dont la CGT-Educ’Action, et exposées dans les réunions des conseils d’administration des EPLE, suscitent l’inquiétude des personnels, qui de plus en plus nombreux se mobilisent pour exprimer leur désaccord.

La CGT-Educ’Action académie de Créteil mettra tout en œuvre pour que la mobilisation des personnels impose l’abandon de la généralisation des bacs pro 3 ans.

« 4 pages » spécial bac pro en 3 ans de la CGT-Educ’Action académie de Créteil
Circulaire du ministère

Un bac pro en 3 ans....

A l’occasion d’un déplacement en province [1], presque en catimini, Xavier Darcos a dévoilé son intention de généraliser le bac pro 3 ans. Dans la même déclaration, il annonçait vouloir réduire l’offre des diplômes. Deux annonces que nous devons appréhender en cohérence.
Si leur mise en oeuvre aboutissait, elle transformerait fondamentalement l’enseignement professionnel dans son organisation et dans ses finalités. Elle consacrerait, dans les faits, l’abandon de la formation des ouvriers hautement qualifiés par l’Education nationale.


Le bac pro 3 ans tel qu’il s’est développé depuis 2001

Initiée en 2001 sous la pression de l’UIMM [2], l’expérimentation des bacs pro 3 ans concerne aujourd’hui 10 000 élèves. Initialement réservée au secteur de la métallurgie, elle s’est étendue au tertiaire. En principe, les cursus 3 ans se situent en parallèle des cursus 4 ans (2 ans BEP et 2 ans bac pro) sans s’y substituer, pour permettre à tous les élèves d’atteindre le terme de la formation selon leur rythme. Il est important de souligner que dans cette configuration, les objectifs et les contenus de la formation restent les mêmes. Aucune modification ne doit être apportée aux référentiels, les établissements sont invités à redéfinir les rythmes d’apprentissage et des périodes de formations en entreprises.


Finalités du bac pro et durée de formation

Véritable baccalauréat, le bac pro doit être considéré à égale dignité avec les autres. C’est cependant un bac qui intègre une dimension particulière. Il associe plusieurs finalités : formation culturelle et poursuite d’études, comme les autres, mais également, objectifs d’insertion professionnelle. Ses contenus sont définis en concertation avec les professions à partir de Référentiels d’Activités Professionnelles (RAP).

Cette définition plurielle tient à son appartenance à une formation initiale « intégrée » à l’Education nationale. Elle est la résultante d’une construction historique marquée par des luttes syndicales nombreuses.
Le BEP s’inscrit dans le cursus du bac pro. Les unités constitutives des référentiels confèrent une continuité pédagogique du niveau V au niveau IV. La disparition du BEP, que peut induire le bac pro 3 ans, ne pourrait qu’affaiblir le dispositif outre le fait qu’il supprimerait une possibilité de certification pour les élèves. La raison de cette continuité BEP/ Bac pro est à rechercher dans ce modèle original qui combine savoirs généraux et savoir-faire.

Ce n’est pas seulement une durée adaptée à des élèves supposés rencontrer plus de difficulté que d’autres, c’est une durée qui prend en compte les exigences multifonctionnelles de la formation, à la fois scolaire et professionnelle.

On peut néanmoins concevoir que la durée de formation soit ramenée à 3 ans pour certains élèves, mais nous devons affirmer plusieurs conditions :

- garder les objectifs de formation et ne pas en rabattre sur les exigences de culture générale et de professionnalisation ;

- maintenir les cursus 4 ans en parallèle ;

- permettre l’obtention du BEP en cours de cursus.

Cette conception est confortée par le point de vue de l’Inspection générale qui note les aspects positifs mais aussi les limites du bac pro 3 ans, et qui met en garde contre les dangers d’une généralisation.

...peut en cacher un autre !

Mais attention, un bac pro 3 ans peut en cacher un autre !

En annonçant la généralisation des bacs pro 3 ans, Xavier Darcos s’écarte fondamentalement de cette conception.

Il n’est plus question de maintenir « les 4 ans » en parallèle. La première étape consistera, dès la rentrée prochaine, à passer de 10 000 élèves à 40 000 dans les bacs pro 3 ans. D’ici 2010, tous les élèves seraient concernés. En second lieu, à plus ou moins long terme, les finalités des formations et leurs contenus seront redéfinies.

Comment se matérialiserait la diminution du nombre des diplômes de l’Education nationale voulue par le ministre ? Actuellement, il existe 69 Bac pro, à terme, il devrait en rester 20.

Selon la logique ministérielle qui veut imposer des bacs pro plus généralistes, on peut penser que cette diminution se réaliserait par l’abrogation de la totalité des bacs pro et par la création de 20 nouveaux, synthèse de plusieurs bacs pro existants.

Exemple : il existe 6 bacs pro du domaine de la maintenance avec des spécialités précises [3]. Le principe pourrait être de redéfinir un seul bac pro très généraliste des métiers de la maintenance, et de repousser la spécialisation professionnelle (maintenance automobile par exemple) à plus tard dans l’entreprise. Même raisonnement avec les 3 bacs pro des métiers du bois, etc.

Une conception libérale qui joue contre les qualifications

Cette proposition s’inscrit dans les objectifs de la loi Fillon qui préconise des diplômes à champ professionnel large. Elle est développée dans le rapport d’audit sur l’enseignement professionnel qui mentionne : « Il s’agit de concevoir les diplômes professionnels de la façon suivante : un diplôme, à spectre large, délivré par l’Etat ; des mentions de spécialisations, acquises en entreprise ou en formation. La spécialisation fait partie du diplôme sans pour autant être reconnue dans la certification. La certification reste générale, l’expérience est particulière ».
On est dans le droit fil des revendications du MEDEF qui ne souhaite reconnaà®tre que des compétences attachées au poste de travail. C’est par ailleurs une conception qui vise à rendre le travailleur acteur responsable de sa formation pour « entretenir son employabilité ».
Ainsi, le jeune diplômé, quel que soit le niveau de sa formation initiale, doit se mettre en quête d’une formation complémentaire, dont la reconnaissance reste incertaine, via un contrat d’apprentissage ou un contrat de professionnalisation.
La perspective d’une embauche ferme se trouvant repoussée à plus tard.
Des résistances à cette attaque en règle contre la valeur des diplômes professionnels sont cependant perceptibles. Elles viennent parfois des entreprises elles-mêmes qui ne sont pas sur la longueur d’onde du MEDEF et qui restent demandeuses de formations professionnelles adaptées aux métiers.

La CGT-Educ’action agira pour qu’elles se construisent avec les personnels, afin que l’enseignement professionnel ne soit pas sacrifié sur l’autel du libéralisme.

Le bac pro 3 ans dans l’académie de Créteil :

vers la multiplication par 5 des sections de bac pro en 3 ans !

La CGT-Educ’Action a été reçue le 16 octobre 2007 par le Recteur de l’académie de Créteil. La question du bac pro en 3 ans était bien entendu à l’ordre du jour. Nous avons interpellé le Recteur et le DAET sur la réalité du bilan actuel très contrasté de l’ implantation des 48 divisions ouvertes à cette rentrée dans l’académie de Créteil (15% des Bac pro 1re année et 9% des BEP 2 ans). Ce bilan nous semble déjà très volontariste car l’attractivité revendiquée par l’institution nous semble largement mise en défaut. Des indicateurs peuvent l’attester et ne sont pas pris en compte par le rectorat comme la réalité vécue des équipes pédagogiques. Par ailleurs, la montée en puissance a été faite principalement sur les 3 dernières années dans le secteur de la Bureautique Secrétariat et Comptabilité en supprimant les BEP et en mettant en place des sections Commerce ou Vente en Bac Pro 3 ans. Enfin, l’administration refuse de tenir compte du rapport transmis en septembre 2005 sur le bac pro en 3 ans.

La CGT-Educ’Action estime que le Bac Pro 3 ans doit demeurer un parcours diversifié ouvert à certaines conditions. Sa généralisation nous semble ne pas devoir être à l’ordre du jour d’autant que l’Education Nationale n’a pas intérêt à sacrifier l’existence du BEP reconnu comme un niveau de qualification professionnelle au sens des réalités de plusieurs familles de métiers. Pour la CGT, revaloriser la voie professionnelle ne consiste pas à faire de l’affichage vis à vis des collégiens et des familles sur le « bac pro comme les autres », d’ailleurs sur ce plan ce n’est pas une réussite, mais à répondre aussi aux enjeux de la qualification de tous les diplômes professionnels du niveau V au niveau III voir II pouvant être offerts dans les lycées généraux,/technologiques, polyvalents et professionnels. Dans ce sens l’exemple du BEP 1 an qui accueille près de 1300 élèves dans 56 divisions dans notre académie sans perspective d’évolution réelle (contrairement d’ailleurs au rapport d’audit sur les LP) constitue un parcours diversifié en LP ouvert aux élèves de seconde et mérite certainement une approche plus générale qui permettrait de mieux diversifier la seconde de détermination vers l’enseignement professionnel.

La circulaire rectorale sur le bac pro en 3 ans n’est actuellement pas publiée. Mais comme cela relève d’une stratégie concertée et ne signifie nullement que pendant ce temps rien ne se passe. Les chefs d’établissement ont d’ailleurs été réunis et le discours qui leur a été fait voulait les inciter à ouvrir largement des bac-pro 3 ans.
Rappelons que pour l’instant, dans l’académie, seuls environ 5% des élèves entrant dans l’enseignement professionnel sont dans des filières de bac-pro 3 ans. Passer à un taux de 25% pour la rentrée 2008, entraà®nerait des modifications très brutales.

Dans tous les établissements, il faut débattre collectivement de cette réforme et des moyens de s’y opposer et aller interroger le chef d’établissement sur les demandes d’évolution de la structure de formation qu’il a adressé au rectorat. Il faut refuser d’entériner les choix d’ouverture de telles sections et de fermeture de BEP. Faà®tes remonter toutes les infos et actions entreprises.


[1Reims, septembre 2007

[2Fédération de la métallurgie du MEDEF

[3Maintenance des véhicules Automobiles (option bateau de plaisance), (option voitures particulières), Maintenance des équipements industriels, des matériels, des systèmes mécaniques automatisés (avec deux options)